Site du domaine : http://www.closdesfees.com/
Présentation à venir ...
Arrivé dans la vallée de l'Agly en quête de sens et de racines, l'ancien sommelier a ouvert la voie de la reconnaissance à toute une appellation.
Il était une fois, ou plutôt il était une fée... qui avait décidé de changer la vie d'Hervé Bizeul. Il en avait déjà connu plusieurs: meilleur jeune sommelier de France en 1981, restaurateur à Paris, journaliste pour Cuisine et vins de France et dans les émissions de son ami Jean-Pierre Coffe. Mais voilà: en 1997, le dégustateur commençait à s'ennuyer. Lassé de la critique, il cherchait à retrouver du plaisir dans le vin. Sa quête l'avait ramené dans son Roussillon natal, sur le chemin des vignes. Ses promenades se terminaient immanquablement devant des carignans et des grenaches fatigués, essorés par le soleil et le vent, plus souvent visités par les sangliers que par leurs propriétaires. Un jour, dans la vallée de l'Agly, il mit imprudemment le pied dans une vigne d'apparence inoffensive, cernée de murets écroulés et de chênes verts aux bras noueux. Un piège, un sortilège, aussitôt refermé sur lui. "J'ai pensé que si les fées existaient, c'est là qu'elles viendraient danser au solstice", aime-t-il raconter. Ainsi naquit le Clos des Fées, avec une cisaille et un pulvérisateur à dos, et l'envie de "comprendre toutes les étapes qui font qu'un morceau de bois sombre donne naissance, des années plus tard, à un nectar qu'il est impossible d'oublier". Il n'a pas résolu ce mystère. "Mais j'ai appris une chose: pour faire un grand vin, il faut lâcher prise."
Quelques relations aidèrent Hervé Bizeul à mettre la main sur 8 hectares qui, à l'époque, ne valaient rien, et sur une vieille maison, à Vingrau, pour accueillir sa première vendange, dans le garage. "Je n'avais jamais travaillé dans les vignes ni fait le moindre stage en cuverie. Tant mieux, sinon j'aurais vu à quel point j'étais fou", dit-il avec le recul. L'ignorant enthousiaste achète un motoculteur en vendant les joyaux de sa cave et vinifie, en 1998, son millésime inaugural, pressé dans une toile à beurre! Il puise l'eau au lavoir du village, de l'autre côté de la rue.
La livraison par drone
Les fées ne l'ont pas abandonné: les premiers commentaires sont élogieux. A peine nés, les vins rouges d'Hervé Bizeul, avec un rendement de misère, des macérations prolongées et un élevage sur lie, sans soufre, révèlent la puissance du terroir de Vingrau. Ce patchwork argilo-calcaire, couronné de falaises urgoniennes, souffre du désamour des consommateurs pour les vins doux naturels. "Et pourtant, il n'y a qu'en Alsace et à Madagascar qu'on retrouve une telle variété géologique sur un si petit territoire", affirme le chantre de l'Agly, autodidacte avide de lectures consistantes et de nouveautés high-tech. Sa dernière tentation: la livraison par drone.
Mais revenons à ses débuts fracassants: en 2002, le néophyte déclenche un coup de tonnerre dans le cirque de Vingrau, en osant mettre sur le marché une bouteille de côte-du-roussillon-villages à 200 euros. La Petite Sibérie est un Ovni flirtant avec les limites de l'appellation -pur grenache ouillé au mourvèdre et à la syrah. Son intensité aromatique capiteuse, doublée de tanins et d'alcool en excès, est miraculeusement tenue en équilibre par une minéralité venue du froid: une bise glacée qui souffle pendant huit mois de l'année sur la coulée de schiste, et dont la parcelle tire son nom si peu méridional. Le prix immodeste de ce flacon met en ébullition le monde du vin. Pourtant, Bizeul reste humble: "Je n'y suis pour rien, tout est dans les raisins." La cuvée iconoclaste, qui résiste à l'épreuve du temps, n'a pas fini de faire jaser. Lui n'en démord pas: "Il y a encore des grands crus à découvrir ailleurs qu'en Bourgogne et dans le Bordelais."
Le Roussillon: un eldorado où tout reste possible
Pour cet explorateur, le Roussillon est un eldorado où tout reste possible. S'il a construit son succès sur la résurrection de vieilles vignes traditionnelles, en grenache et en carignan, il a aussi rapidement planté ses premières syrahs, du mourvèdre, du cabernet sauvignon et même, récemment, du pinot noir, jouant de la variété des terroirs et de la grande liberté qu'offre l'appellation. Il en tire ses cuvées signatures. N'ayant plus rien à prouver, le vigneron entretient sa créativité. Il a un don pour extraire la quintessence de ses baies, mais plus il avance, plus il ménage l'emploi du bois neuf.
L'ancien journaliste a découvert la puissance des réseaux sociaux dès leurs frémissements. Il en a fait son arme favorite pour contourner l'establishment. Il exerce sa plume alerte dans un blog très suivi -20 000 visiteurs par mois-, où il narre le quotidien du domaine et (s')interroge sur le monde du vin, mêlant à ses réflexions philosophiques coups de coeur et coups de gueule. Le trublion s'est agrandi, à défaut de s'assagir. Le Clos des Fées (43 hectares désormais) a inauguré, l'an dernier, un nouveau chai dernier cri, près de Rivesaltes, qui lui permet de vinifier, à côté des vins de garde et des bouteilles d'auteur, des cuvées à gros volume, sous l'étiquette des Sorcières et du domaine de La Chique (racheté en 2012). "J'aime aussi l'idée de proposer des vins plus modestes, accessibles à tous, comme un chef avec son gastro et son bistrot." Mais quel que soit le prix de la bouteille, le message reste le même: l'émotion, proportionnelle au temps passé à cajoler la vigne.
NOTRE SÉLECTION
Clos des Fées, côtes-de-roussillon Vieilles vignes, 2013 Un vin de cépages autochtones, sans "améliorateurs", élevé en cuve de béton. Le Roussillon à l'état pur, fruité, soyeux, épicé. 25 euros
De battre mon coeur s'est arrêté, 2015 Une syrah brute de cuve, croquante, non élevée, qui se tient pourtant très bien à table. 18 euros
Les Sorcières, rouge, 2015 Fruit explosif, tanins délicats, bouche soyeuse... Un plaisir immédiat et abordable. 12 euros
Un faune avec son fifre, 2013 Expression solaire et calcaire du cabernet franc. 13,50 euros
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